Comment un éléphant s'est-il retrouvé dans la cuisine de Françoise?

Il me donna un petit coup de museau sur la jambe et jappa pour quémander sa friandise. J’étais sur le point de céder, lorsque Jeff leva la tête et grogna paresseusement.

J’entendis un coup bref à la porte. Je restai immobile. Dans le bush, les visites inopinées sont plutôt rares à cette heure de la nuit.

— Françoise ? C’est moi, chuchota une femme. J’ouvris grand la porte.

— Tom ? Qu’est-ce que tu fais là ? Il y a un problème ?

Elle agita les bras pour me faire signe de sortir et dit :

— Il y a un bébé éléphant, là-bas.

— Un bébé éléphant ?

— Il est là, devant la maison. Il est tout petit et il a l’air terrorisé.

Certains de mes employés adorent jouer des tours, mais Tom est une personne sérieuse. Quand elle est arrivée chez nous après avoir terminé sa scolarité, c’était une jeune fille très timide. Elle avait tellement peur de son nouveau cadre de vie qu’elle se ca- chait systématiquement dans la buanderie lorsque Lawrence en- trait dans la cuisine ! Elle a fini par affronter ses craintes avec le courage d’une lionne et, aujourd’hui, c’est un chef merveilleux et un as de la pâtisserie.

— C’est sûrement la fille d’E.T. qui est née la semaine dernière, dis-je tristement.

La petite éléphante avait été vue, la nuit précédente, devant la clôture électrique, mais on m’avait assuré qu’elle était retournée auprès de sa mère. J’étais sidérée d’apprendre que cela n’était pas le cas. Je ramenai les chiens dans ma chambre tandis que Tom me racontait ce qui s’était passé.

— J’ai entendu du bruit, dehors, mais quand j’ai regardé par la fenêtre, il n’y avait rien. J’ai supposé que c’était un potamo- chère ou un daim, et je suis retournée me coucher, mais le bruit persistait, dit-elle en fronçant les sourcils.

Tom avait grandi dans le Zululand rural et n’était pas facilement décontenancée par les bruits nocturnes, mais celui-là, elle ne l’avait jamais entendu. Elle avait pris sa lampe torche, entrouvert la porte et éclairé le jardin.

Un éléphanteau la regardait, les yeux ronds de peur.

Étonnée, elle avait refermé doucement la porte et était sortie par la fenêtre de derrière pour venir chez moi.

"Elle avait parcouru des kilomètres pour arriver ici et était très angoissée à son arrivée - elle avait l'air fatiguée, assoiffée et affamée."

Un éléphant dans ma cuisine dans les nouvelles

Portrait de Françoise Anthony Malby, Reportage de Gaëlle Fauquembergue et Karine Albertazzi

Françoise Malby-Anthony, un éléphant dans sa cuisine